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Gériatrie :
Nous avons rencontré la première kinésithérapeute coordonnatrice de France

Sophie Conrard
Kiné actualité n° 1632 - 18/05/2023

Le 4 mai, Hortense Lasserre a officiellement pris ses fonctions de kinésithérapeute coordonnatrice dans l'Ehpad où elle travaillait déjà, "Les Saules" [1], à Montauban. Elle nous présente cette nouvelle fonction dont la fiche de poste a été proposée par la FFMKR.

Kiné actualité : Qu’est-ce qu’un kinésithérapeute coordonnateur ? Quel est son rôle ?

Hortense Lasserre : Comme je suis la première de France à occuper officiellement ces fonctions, il a fallu élaborer une fiche de poste et un contrat. Nous nous sommes appuyés sur le travail de la FFMKR, qui œuvre pour que les Ehpad intègrent ce nouveau métier.

Mon rôle est à la fois actif et administratif. J’ai différents types de missions : j’interviens sur le maintien de l’autonomie du résident ; je participe à l’analyse mensuelle des chutes dans l’établissement, dans l’objectif d’en réduire le nombre ; je participe au projet de vie du résident sur le plan de la motricité ; j’interviens dans la formation des équipes avec 2 objectifs : diminuer la survenue des TMS chez les soignants et éviter l’augmentation de la dépendance iatrogène évitable des soins pour les résidents (en d’autres termes, mon rôle est de veiller à ce qu’on ne fasse pas tout à leur place, sinon cela contribue à leur perte d’autonomie) ; et je coordonne tous les soins de rééducation dont les résidents ont besoin : orthophonie, ergothérapie, psychomotricité… À ce jour, j’y consacre 2 demi-journées par semaine. Cela évoluera peut-être.

Un kinésithérapeute coordonnateur peut-il être amené à remplacer un médecin coordonnateur ?
Non ! Il n’y a aucune concurrence avec le médecin coordonnateur. Je ne fais pas de prescription, par exemple. Le kinésithérapeute coordonnateur apporte au médecin coordonnateur son expertise des troubles fonctionnels. Sa formation de rééducateur à la fois généraliste et transversale, mais aussi spécialiste de certains troubles (dont les TMS), permet d’améliorer la qualité des soins et réduire de la pénibilité du travail des soignants.

Nous nous voyons une demi-journée par semaine. Nous travaillons en équipe, il est très à l’écoute et cela l’intéresse de constituer un binôme de spécialistes des troubles organiques et fonctionnels. Et nous avons pris soin de communiquer en ce sens auprès des résidents et de leurs familles, du personnel de l’établissement, des kinésithérapeutes intervenants, etc.

Quel a été votre parcours et qu’est-ce qui vous a poussée à devenir kinésithérapeute coordonnatrice dans l’Ehpad où vous travailliez déjà ?
Après avoir obtenu mon diplôme de masseur-kinésithérapeute en 2003, je me suis tout de suite installée en libéral et j’ai fait à la fois du cabinet et des domiciles.

Ensuite, je me suis formée en ostéopathie, en 5 ans, et j’ai obtenu le titre en 2010. L’occasion s’est présentée de faire des soins en Ehpad, dans un établissement de 105 lits du groupe Edenis, ce qui m’a beaucoup plu. C’est mon ancienne directrice qui m’a proposé de devenir kinésithérapeute coordonnatrice.

Je suis très heureuse de pouvoir m’investir encore plus dans le domaine de la gériatrie, mais aussi de ne plus être uniquement dans le soin et de découvrir d’autres aspects du métier de kinésithérapeute. J’ai le sentiment d’être au plus près du résident.

Désormais, je partage mon temps entre des soins de kinésithérapie à domicile, mon cabinet d’ostéopathie et l’Ehpad.

Les fonctions du kinésithérapeute coordonnateur en Ehpad.

Comment vous êtes-vous préparée à ce nouveau poste ?
J’ai découvert la gériatrie assez vite dans ma carrière : quand on fait des domiciles, on s’occupe forcément de personnes âgées, plus ou moins dépendantes. J’ai toujours aimé côtoyer ce genre de patients. Mais je trouve que nos études ne nous y préparent pas de façon pointue, or il y a des choses à savoir sur le plan physiologique, sur le vieillissement naturel, etc. Je me suis donc formée en gériatrie, petit à petit, pour être la plus pointue possible dans ce domaine, qui me passionne depuis le début de ma carrière. J’ai récemment fait plusieurs stages de 2 ou 3 jours, et je vais bientôt démarrer un DU en kinésithérapie gériatrique sur un an. Cela m’a beaucoup plu de sortir un peu de ma “routine” pour me former.

Pouvez-vous nous en dire plus sur les formations que vous allez mettre en place pour le personnel de l’Ehpad ?
Je vais par exemple concevoir de A à Z une formation à l’attention des aides-soignantes, d’une part pour éviter qu’elles se blessent en travaillant, d’autre part pour qu’elles ne soient pas tentées de faire les choses à la place du résident pour aller plus vite. Il s’agit d’apprendre à solliciter les capacités du résident, par exemple pour se relever s’il chute. Sur ce sujet, j’ai moi-même été formée par Damien Olivon [2], qui est convaincu que la prévention de la dépendance iatrogène évitable chez les personnes âgées et la prévention des TMS chez les soignants vont de pair. C’est du gagnant-gagnant. Or qui est l’expert de la sollicitation des capacités fonctionnelles du résident et de la prévention des TMS ? Le kinésithérapeute.

[1] Réseau Edenis, association à but non lucratif.
[2] Kinésithérapeute libéral en Ehpad et salarié dans un SSR gériatrique (le CSSR La Clauze, à Saint-Jean-Delnous), spécialisé en gériatrie, secrétaire général en charge du grand âge et de la perte d’autonomie à la FFMKR, il est l’un des principaux artisans de la création de postes de kinésithérapeutes coordonnateurs en Ehpad et un fervent défenseur de la prévention de la perte d’autonomie des résidents.

©FFMKR
© D.R.

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