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Violences conjugales : la levée du secret médical désormais possible sous conditions

Jean-Pierre Gruest
24 août 2020

Le 31 juillet a été publiée au Journal officiel la loi n°2020-936 visant à protéger les victimes de violences conjugales. Les députés et sénateurs ont adopté, respectivement les 16 et 21 juillet, la proposition de loi portée par les députés Bérangère Couillard (LREM, Gironde) et Guillaume Gouffier-Cha (LREM, Val-de-Marne), dont l'une des dispositions permet à tout professionnel de santé de signaler aux autorités des situations de danger imminent sans l'accord de la victime, dérogeant ainsi au secret médical.

C'est un acte fort de la part du Parlement, qui a adopté définitivement, à l'issue de son examen au Sénat, la proposition de loi ayant pour objectif de protéger les victimes de violences conjugales. Déposé le 3 décembre par 2 députés LREM, le texte a fait l'objet d'une procédure accélérée par le gouvernement. Adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 29 janvier, la proposition de loi l'avait été le 9 juin par le Sénat, qui l'avait modifiée en rejetant certains amendements, notamment ceux portant sur la possibilité pour le professionnel de santé de se passer de l'accord de la victime pour effectuer un signalement aux autorités, au risque de détruire le lien de confiance entre le praticien et son (sa) patient(e).

Riche de 29 articles (contre 15 initialement), le texte publié au JO a fait l'objet d'un accord entre les 2 assemblées dans le cadre d'une commission paritaire mixte. Il vise à réprimer davantage les faits de violence au sein du couple, y compris le harcèlement moral, et comporte une mesure permettant une nouvelle dérogation au secret professionnel auquel sont astreints les professionnels de santé. L'article 12 modifie ainsi l'article 226-14 du code pénal et instaure que l'interdiction de révéler des informations couvertes par le secret professionnel (y compris le secret médical) ne s'applique ni "au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui porte à la connaissance du procureur de la République" toute information relative à des violences exercées au sein du couple, dans 2 conditions : "lorsqu'il estime en conscience que ces violences mettent la vie de la victime majeure en danger immédiat" et que celle-ci "n'est pas en mesure de se protéger en raison de la contrainte morale résultant de l'emprise exercée par l'auteur de ces violences".

L'article précise que le professionnel de santé doit "s'efforcer d'obtenir l'accord de la victime majeure". S'il n'y parvient pas, "il doit l'informer du signalement fait au procureur de la République".

Ces dispositions s'ajoutent aux exceptions déjà prévues à l'article 226-14 du code pénal, lequel protège déjà le professionnel de santé qui, "avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République ou de la cellule de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger, ou qui risquent de l'être (…), les sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychique de toute nature ont été commises".

Si le professionnel de santé doit obtenir, dans la mesure du possible, l'accord de la victime majeure pour ces signalements, celui-ci n'est pas nécessaire pour le mineur ou toute personne "qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique".

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