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Stages de rééducation intensive : la Fondation Paralysie Cérébrale cherche 22 enfants pour participer à un projet de recherche

C'est la manière dont on propose à l'enfant de manipuler des objets dans l'environnement qui va permettre de le faire avancer tout en jouant. Il n'y a pas d’étirements, ni de mise en posture. Les mouvements sont exclusivement volontaires et le thérapeute ne touche pas l'enfant.

Sophie Conrard
- 2 octobre 2020

La Fondation Paralysie cérébrale cherche 22 enfants pour participer à une étude destinée à montrer les bienfaits d'une rééducation intensive et ludique sur l'autonomie de ces patients. Ils doivent être âgés de 1 à 4 ans et atteints d'une paralysie bilatérale. Si vous en suivez dans vos cabinets, n'hésitez pas à leur en parler !

Cette étude, qui avait démarré avant la crise sanitaire, a vu certains stages de rééducation reportés de plusieurs mois. Certains enfants qui devaient y participer ont dépassé la limite d'âge requise. L'association cherche à en recruter de nouveaux le plus vite possible, afin de ne pas retarder plus longtemps les stages prévus. La difficulté réside notamment dans le fait que ces enfants doivent être associés par paires, avec des caractéristiques strictement identiques (âge, handicap...). L'un sera intégré au groupe témoin, l'autre au groupe recherche. Afin qu'aucun enfant ne soit lésé, tous bénéficieront du stage : ceux du groupe témoin y participeront après l'étude.

Les prochains stages sont prévus en 2021.

Utiliser la plasticité cérébrale pour récupérer des fonctions motrices
Il s'agit, lors de ces stages, de tester la thérapie HABIT-ILE, pour Hand and arm bimanual intensive therapy including lower extremities, un protocole de rééducation intensive précoce destiné aux enfants en âge pré-scolaire mis au point par le Pr Yannick Bleyenheuft (UCL Bruxelles) qui a montré, par une étude menée entre 2014 et 2018, qu'elle était efficace sur les enfants de 6 ans et plus.

Or on sait que la majeure partie de la croissance et du développement du cerveau survient avant 2 ans. Il s'agit donc de tester ce programme intensif avec des enfants plus jeunes (de 1 à 4 ans), sous la forme suivante : 50 h d'exercices réparties sur 2 semaines, dans un site adapté, par groupe de 8 enfants. L'idée est de favoriser la plasticité cérébrale et la réorganisation des réseaux neuronaux dans l'objectif de récupérer des fonctions motrices.

Lors des stages, les enfants sont encadrés par des médecins de MPR, des kinésithérapeutes, des psychomotriciens, des ergothérapeutes et des orthophonistes. Ils s'entraînent 5 h par jour, avec des objectifs clairement définis en concertation avec les parents. La thérapie se veut vraiment ludique et sollicite le plus souvent le corps entier. L'enfant fait tout lui-même, le thérapeute n'est là que pour le guider, car le but est bien d'autonomiser au maximum ces patients.

"Ma fille a pris confiance en elle"
La petite Charlotte a participé à l'un de ces stages, en juillet dernier. Elle avait alors 3 ans et demi. "Elle a adoré son stage parce qu'elle s'est beaucoup amusée. Et elle a réussi à faire beaucoup de choses par elle-même, ce qui l'a rendue très fière", raconte Amélie, sa mère. Évidemment, c'est toute une logistique à prévoir [1], mais cela en valait la peine : "Avant le stage, Charlotte était incapable de se déplacer, de se tenir assise ou de m'aider à l'habiller. Aujourd'hui, elle a pris confiance en elle et elle est capable de faire beaucoup de choses toute seule : à la maison, elle nous propose de faire la course à 4 pattes avec elle, elle hésite moins à s'exprimer... Elle se déplace toute seule avec son déambulateur, y compris à l'école ! Ce stage a débloqué beaucoup de choses, et pas seulement au niveau moteur." La kinésithérapeute qui la suit chez elle a constaté quels progrès significatifs elle a accompli grâce à ce stage. Cerise sur le gâteau : le côté intensif de ce programme n'a pas augmenté la spasticité.

La petite fille était très heureuse de s'y rendre chaque jour. Elle n'avait pas l'impression de s'entraîner ou de travailler : "2 thérapeutes jouaient en permanence avec les enfants. Ils sont là pour trouver des solutions avec chacun et éviter qu'ils se sentent en échec. Ils ne donnent pas de consigne du genre mets-toi assise, ils utilisent le jeu pour amener l'enfant à s'asseoir sans même s'en apercevoir", détaille Amélie.

Malgré le rythme intense de ce stage, Charlotte n'était pas fatiguée à la fin de la journée. "Elle était même capable de jouer encore 1h à la maison après notre retour."

À l'issue du stage, pour pérenniser tous les progrès accomplis, les parents sont invités à faire des exercices avec leur enfant à la maison. "Il faut beaucoup les stimuler." Amélie a beaucoup parlé de ce programme à la kinésithérapeute qui suit sa fille, et celle-ci a pris la peine de modifier sa façon de travailler pour que la rééducation soit plus efficace. Mais il est difficile de reproduire les conditions du stage en libéral. "Sur une séance de 30 minutes, si on déduit le temps nécessaire pour déshabiller et rhabiller l'enfant, plus le temps que celle-ci prenne ses marques, il ne reste plus grand-chose", confirme Amélie. "C'est frustrant."

En pratique

La Fondation Paralysie cérébrale consacre 1,5 millions d'euros au projet de recherche visant à démontrer les bienfaits de la méthode HABIT-ILE. 3 pays y participent : la France, la Belgique et l'Italie.

22 places sont à pourvoir pour les stages prévus à Angers en avril et Brest en juin 2021.

Plus d'infos : contacter Servane Le Moal, de la Fondation Ildys, servane.lemoal@ildys.org

[1] En dehors du logement et de la logistique, un stage coûte environ 3200 € (sauf pour les enfants intégrés à ce programme de recherche, pour qui il est gratuit).

© D.R.

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