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Gériatrie : lancement d'une expérimentation nationale du programme Icope

Sophie Conrard (avec APM news)
- 11 janvier 2022

Porté par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Icope est un programme visant à prévenir la perte d'autonomie. L'ambition est de prévenir l'entrée en dépendance de 15 M de personnes dans le monde d'ici 2025, dont environ 150 000 en France, grâce à des parcours de soins intégrés reposant sur une démarche de prévention structurée.

Un arrêté vient d'être publié au Journal officiel, autorisant une expérimentation nationale de ce programme pour 3 ans. C'était l'une des mesures importantes de la stratégie gouvernementale "Vieillir en bonne santé", annoncée en janvier 2020. En juin, le ministère de la Santé avait annoncé son lancement d'ici fin 2021 afin d'adapter le programme au contexte français, de tester les organisations innovantes possibles et de définir un modèle de financement.

Un cahier des charges a été établi avec les "porteurs expérimentateurs présélectionnés" par un appel à manifestation d'intérêt (AMI) et avec la "contribution spécifique" du gérontopôle de Toulouse, centre collaborateur de l'OMS. Ce dernier pilote depuis 2019 un projet local Icope (pour Integrated Care for Older People, d'après I cope en anglais, "Je fais face") soutenu par l'ARS Occitanie.

La cible
La population visée par cette expérimentation est celle des personnes de 60 ans et plus, à domicile (habitat intermédiaire inclus), en amont de la perte d'autonomie (robustes, préfragiles, fragiles), "avec une priorisation sur les seniors en situation de vulnérabilité" (précarité socio-économique, isolement social, éloignement géographique, éloignement des soins, statut d'aidant), peut-on lire dans le cahier des charges.

Les porteurs expérimentateurs retenus à l'issue de l'AMI et ayant confirmé leur participation à l'expérimentation nationale regroupent déjà 40 227 seniors : Hospices civils de Lyon (4 855 seniors), Fédération corse pour la coordination et l'innovation en santé (1 819), groupe Filieris Sud à Alès (3 469), gérontopôle de Toulouse (10 000), plateforme territoriale d'appui du Lot (1 200), inter-URPS des Pays-de-la-Loire (13 533) et, en Provence-Alpes-Côte d'Azur, Mutualité française (738) et URPS (4 613). L'effectif global pourra être porté à 55 227 seniors inclus, "soit un complément de 15 000 seniors", précise le cahier des charges.

Sur les 5 régions déjà sélectionnées (Auvergne-Rhône-Alpes, Corse, Occitanie, Paca et Pays de la Loire), 16 départements sont concernés : Rhône, Haute-Corse, Corse-du-Sud, Haute-Garonne, Ariège, Gers, Lot, Gard, Tarn, Alpes-de-Haute-Provence, Alpes-Maritimes, Bouches-du-Rhône, Vaucluse, Vendée, Maine-et-Loire et Loire-Atlantique.

Déroulement des opérations
L'expérimentation, qui s'appuiera sur des tests standardisés et des outils numériques, prévoit une étape de dépistage, une évaluation des capacités fonctionnelles par des professionnels de santé formés, l'élaboration d'un projet de plan de prévention puis celle d'un plan de soins personnalisé. S'y ajoutent ensuite une orientation, le suivi du plan, la mobilisation des communautés d'acteurs du territoire ainsi qu'un soutien aux aidants.

La démarche vise en priorité à améliorer la précocité du diagnostic du déclin des capacités fonctionnelles et de la "prise en soins" (accompagnement social et soins sanitaires et médico-sociaux) et à intégrer ces actions dans les pratiques des acteurs des soins primaires.

Le Samu et les établissements de santé peuvent également repérer des seniors en sortie d'hospitalisation ou lors d'un passage aux urgences, leur recommander le test en autodépistage ou les orienter.

L'objectif est d'impliquer activement les personnes de 60 ans et plus, et de renforcer leurs capacités à "entretenir leur santé fonctionnelle". Un outil d'autosuivi simple d'utilisation leur sera proposé, ainsi qu'une "approche motivationnelle" pour les accompagner dans un changement de comportements durable.

Les soins primaires en première ligne
Pour le dépistage, l'ensemble des acteurs des "champs de la santé, social, médico-psychosocial ou sportif" des territoires expérimentateurs sont potentiellement concernés. Leur aide sera soumise à la formation socle de la démarche Icope.

Pour l'évaluation, les professionnels mobilisés sont ceux des soins primaires. "Un professionnel formé à cet effet sera désigné comme l'acteur clé du déroulement" de cette étape "pour chacun des seniors, en appui du médecin traitant si ce n'est pas celui-ci qui initie" cette étape.

Financé par l'assurance maladie
Outre les financements de droit commun (consultations de médecine générale, actions des collectivités territoriales…), des rémunérations dérogatoires sont prévues et feront l'objet d'une convention de financement entre chaque porteur expérimentateur et l'assurance maladie. Des conventions seront également établies entre les porteurs expérimentateurs et les intervenants percevant ces rémunérations dérogatoires. Le conventionnement avec le CHU de Toulouse inclura le financement de son appui d'expert à l'expérimentation nationale.

Dans les prestations dérogatoires, il est prévu une enveloppe annuelle "animation territoriale" (mission de santé publique communautaire pour les CPTS ou autres groupements de professionnels), fixée entre 11 200 et 19 600 € selon la taille du territoire couvert.

Une autre enveloppe "repérage" est créée pour l'accompagnement à la réalisation du test (18 €).

Enfin, des forfaits par senior sont prévus : "gestion des alertes" (11 €), "évaluation" (53 € ou des forfaits de 20, 40 ou 60 € selon le nombre de capacités altérées) et "entretien motivationnel" (21 €). Les frais de déplacements kilométriques seront indemnisés pour les évaluations menées à domicile.

Dans l'ensemble, il est attendu que la démarche contribue à limiter le coût de la dépendance en retardant l'évolution vers une perte d'autonomie et en réduisant les coûts des soins liés aux conséquences des déficits fonctionnels (chutes…).

Les kinés s'impliquent

Les URPS financeront 8 500 bilans de dépistage Icope (à hauteur de 18 €) et invitent tous les kinésithérapeutes volontaires à en réaliser dans leurs cabinets (lire notre article complet dans le Ka n°1601 du 13 janvier, page 5). L'idée est d'en faire le plus possible afin de démontrer la place incontournable de la profession auprès des personnes âgées à risque de perte d'autonomie.

Si vous souhaitez participer, rapprochez-vous de votre URPS !

© D.R.

 

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