Décision du Conseil d'État : la déconsidération de la profession peut être caractérisée même sans publicité des faits
Sophie Conrard (avec APM news)
- 27 novembre 2025
La plus haute juridiction administrative de France a rendu le 14 novembre une décision en ce sens.
Le manquement disciplinaire de déconsidération de la profession, chez les professionnels de santé à Ordre, peut être caractérisé même en l'absence de retentissement public autour des agissements litigieux, a estimé le Conseil d'État. Il était saisi d'un pourvoi par le CNOMK qui contestait une décision de la chambre disciplinaire nationale du 28 décembre 2023, qu'il jugeait trop clémente à l'encontre du kinésithérapeute en question.
Celui-ci avait fait l'objet de plusieurs signalements de patientes faisant état de gestes déplacés pendant les soins. il avait été blanchi en première instance, mais sanctionné en appel d'une interdiction d'exercer d'un mois, avec sursis. La chambre disciplinaire nationale avait conclu à des manquements aux articles 53 (respect de la vie et de la dignité de la personne), 54 (principes de moralité et de probité) et 58 (non-discrimination) du code de déontologie de la profession, "en n'informant pas suffisamment ces patientes de la méthode utilisée et en ne recherchant pas systématiquement leur consentement". Mais elle avait estimé qu'il n'y avait pas de manquement aux articles 79 (déconsidération de la profession), 80 (qualité des soins) et 87 (charlatanisme) du code de déontologie.
Dans sa décision, le Conseil d'État rappelle les termes de l'article 79 : "Le masseur-kinésithérapeute s'abstient, même en dehors de l'exercice de sa profession, de tout acte de nature à déconsidérer celle-ci." Pour la haute juridiction, "il résulte de ces dispositions que certains actes commis par un masseur-kinésithérapeute peuvent être de nature, du fait de leur gravité particulière, à déconsidérer la profession, même lorsqu'ils n'ont pas eu de retentissement public". La chambre disciplinaire nationale a donc commis une erreur de droit en écartant le grief de déconsidération de la profession au motif que les actes reprochés au praticien n'avaient fait l'objet d'aucune publicité et n'étaient connus que des seuls patientes concernées.